
Dans l’article précédent, je vous disais que nous avions entre autre choisi Vienne pour l’omniprésence de la nature, mais la raison principale qui nous a amené dans cette ville, aussi surprenant que cela puisse paraître, c’est l’école.
En effet, nous nous posions beaucoup de questions, et avions envie de tester quelque chose de différent. Cette année me semblait être la meilleure pour le faire, puisque Hannah entamait sa dernière année de maternelle, et Léonie sa première. En réalité Léonie qui est née en février et n’a donc que 2 ans 1/2 n’aurait même pas eu entrer à l’école.
Il y a deux ans, alors que nous nous installions dans le centre-ville de Nantes, nous pensions déjà à inscrire Hannah dans une école Montessori. Sophie, son assistante maternelle était formée à la pédagogie, et nous y avions été sensibilisé auparavant à San Francisco. Nous étions néanmoins partagés, car l’accès à l’école publique était également une des raisons pour lesquelles nous avions quitté la Californie pour la France. Nous hésitions et comme à l’époque, les deux écoles maternelles Montessori de Nantes n’avaient pas d’espace extérieur, et étaient situées à une demi-heure de chez nous, nous options pour l’école publique en bas de la rue, qui avait bonne réputation.
Notre expérience fût décevante. Mon retour sur l’école publique en France fera peut-être l’objet d’un autre article, mais si je devais résumer je dirais que finalement j’avais tout simplement le sentiment que Hannah ne s’épanouissait pas. L’école maternelle française me paraît trop sérieuse, j’ai l’impression qu’on demande aux enfants de grandir trop vite, qu’on leur en demande trop tout simplement. C’est d’ailleurs assez pertinent de voir qu’en France la maternelle est une école, et presque que partout ailleurs, c’est un jardin d’enfants. Et j’ai surtout l’impression qu’on ne donne pas (ou peu) l’opportunité aux enfants de s’exprimer. On ne les laisse pas être acteurs de leur journée. Le soir arrivé, les enfants se retrouvent épuisés et frustrés bien loin d’avoir gagné en confiance et en indépendance.
Au printemps dernier, je commençais donc à m’intéresser de près aux pédagogies alternatives (Montessori, Steiner/Waldorf, écoles démocratiques/ Forest schools) et aux différents systèmes éducatifs européens avec un intérêt particulier pour les pays scandinaves et germanophones. Voici les trois livres, que j’ai lu pendant le confinement, qui m’ont particulièrement inspiré.



« The child is endowed with unknown powers, which can guide us to a radiant future. If what we really want is a new world, then education must take as its aim the development of these hidden possibilities. » Maria Montessori.
Ce qui rejoint ces trois livres, et c’est ce qui me plaît dans cette approche, c’est que les auteurs s’intéressent au bonheur, l’épanouissement, et au développement de la confiance en soi des enfants – et non pas à leur réussite scolaire. Dans « The Danish way of parenting » l’hypothèse des auteurs est que si les Danois sont heureux lorsqu’ils sont adultes c’est tout simplement parce qu’on les a laissés jouer librement lorsqu’ils étaient enfants (le fameux concept de « free play« ). Que ce soit à l’intérieur de l’école le matin ou en dehors l’après-midi, la priorité est donnée au jeu, et plus particulièrement au jeu en groupe. Le jeu libre permet à l’enfant de développer sa motricité, sa sociabilité, son empathie, et par là même son assurance et sa confiance en soi.
Ce sont des qualités qui ressortent également chez les enfants qui vont à l’école de la forêt. Savez-vous qu’en Allemagne et en Ecosse plus de la moitié des école maternelles sont des Forest Schools? L’éducation dans la nature est reconnue depuis des années dans ces pays et est même subventionnée par l’Etat. Les enfants apprennent à grimper, construire des cabanes, couper du bois, et sont naturellement sensibilisés à l’environnement. Ils portent des habits adaptés et ont le droit de toucher, de courir et de se salir. Le rêve pour un enfant. Il a été démontré que faire la classe en extérieur favorise l’attention et la concentration des enfants, que les enfants tombent moins malades, et enfin que cela favorise le sommeil profond et récupérateur.
« Si j’étais roi de France, il n’entrerait pas un enfant dans les villes avant qu’il eût l’âge de douze ans (… ) Jusque-là, ils vivraient à l’air, au soleil, dans les champs, dans les bois, en compagnie des chiens et des chevaux, face à face avec la nature qui fortifie le corps des enfants, prête l’intelligence à leur coeur, poétise leur esprit, et leur donne de toutes choses une curiosité plus utile à l’éducation que toutes les grammaires du monde. » Alexandre Dumas
L’école des filles, appelée « The Children’s House »(traduction de Casa dei Bambini – terme instauré par Maria Montessori) est juste fantastique. L’équipe pédagogique est internationale (UK, Autriche, Hongrie, Roumanie, Australie, Inde, Italie, Suisse) et l’enseignement est uniquement en anglais. Le ratio enseignant/ élèves est d’environ 1:8. L’espace extérieur est un mélange entre un jardin, une ferme et une aire de jeux. Les enfants sortent peu importe la météo et passent minimum deux heures par jour dehors. La plupart de ce temps est consacré au jeu libre, mais de nombreuses activités y sont également proposées: elles peuvent être liées au potager ou aux animaux, ou bien tout simplement être des activités manuelles comme de la peinture ou de l’art plastique. Hannah veut constamment sortir! Les enfants participent à la préparation des repas, surtout les petits. Léonie coupe et épluche les légumes pour le goûter du matin et fait sa propre vaisselle. Les plus grands mettent la table et servent les autres enfants assis à leur table.




Il y a beaucoup de familles internationales mais l’école est également ouverte aux Autrichiens. Et le gros plus, c’est que cette école est subventionnée par la ville comme tous les autres « Stadt Kindergarten » de Vienne. Je me rends d’ailleurs compte, au fil du temps, que l’espace extérieur de l’école des filles est loin d’être une exception ici. Que ce soit à Vienne, ou dans les campagnes autrichiennes, les cours d’écoles publiques ressemblent bien à d’immenses jardins, avec de l’herbe, des arbres, des structures en bois et des bacs à sable. C’est la norme ici, même si cela peut surprendre lorsqu’on est habitué à une cour d’école qui ressemble à un parking.


Résultat du premier cours de menuiserie
Alors il est un peu tôt pour vous donner mon retour sur la pédagogie Montessori, mais nos premières impressions sont très positives. Première grosse différence, ce n’est plus la guerre le matin pour que Hannah se prépare pour l’école. Elle est heureuse de s’y rendre, se lève sans problème et je la récupère avec le sourire et une bonne énergie. Pour Léonie, il est difficile de faire une comparaison. Je la récupère avec la banane, mais ceux qui la connaissent savent que Léonie a (presque) toujours le sourire. Passer autant de temps dehors leur donne bonne mine, et fait que, lorsqu’elles sont à la maison le soir, elles sont plus posées. Elles jouent avec plaisir et sont plus indépendantes et créatives. Léonie chante à tue-tête toute la soirée, mais ça c’est pareil, ce n’est pas nouveau, c’est seulement la langue dans laquelle elle chante qui a changé !